Une grande attention a toujours été accordée à la conche dans la fabrication
traditionnelle de chocolat, le malaxage étant la phase au cours de laquelle les
acides volatiles présents au départ dans les composants du cacao sont éliminés,
et le taux d'humidité est réduit, permettant ainsi le développement de la saveur
délicate du chocolat. C'est particulièrement ce taux d'humidité réduit qui est
favorable aux propriétés rhéologiques et à la durée de conservation du produit.
Un taux de graisse élevé et la présence de la lécithine, qui est un émulsifiant
capable de former un composé avec l'eau, retardent l'évaporation de l'eau
présente dans le chocolat, ainsi que la volatilisation des acides. Pour cette
raison, la déshumidification se produit plus rapidement dans un chocolat raffiné
par rouleaux que dans un produit fabriqué par un système entier. Cela explique
également pourquoi le malaxage à sec est devenu populaire : l'humidité s'évapore
plus rapidement d'une pâte sèche, c’est à dire contenant peu de matières
grasses. Le malaxage est également important car il rend le chocolat
homogène. Cet aspect sera expliqué plus loin.
Pendant le malaxage
du chocolat au lait, il faudra veiller à ce que la température de malaxage
ne soit pas trop élevée car cela augmente considérablement le risque de
réactions entre les protéines du lait et les sucres, provoquant ainsi des
changements indésirables de l'odeur et de la saveur. Comme indication, une
température de 60°C est recommandée, tandis que la température la plus courante
dans le malaxage du chocolat noir est de 70°C.
Au départ, la conche
(concha est le terme espagnol qui signifie coquille) était une cuvette en forme
de coquille, avec un rouleau de granit lourd qu’on faisait déplacer de l’arrière
vers l’avant au-dessus d'un lit de granit plat. Plus tard, cette machine a pris
le nom de Längsreiber ou conche longitudinale. Bien que plusieurs personnes
affirment que cette méthode est exceptionnelle par la saveur qu’elle est capable
de produire, elle est presque totalement tombée en désuétude en raison des temps
de malaxage très longs, qui peuvent aller - selon des rapports - jusqu'à
trois ou quatre jours.
En utilisant des conches modernes, les fabricants
de chocolat cherchent à provoquer des effets de saveur identiques à ceux pouvant
être obtenus avec le mélangeur et la conche traditionnelle, toutefois dans moins
de temps. Cependant un aspect important à prendre en compte est le rôle du
malaxage dans la fabrication du chocolat : à part le fait de donner au produit
la saveur désirée, le processus doit être effectué de telle sorte que le
produit, lorsqu’il est consommé, apparaisse homogène, et fournisse également de
bonnes propriétés rhéologiques en termes de traitement et de perception de la
saveur.
Figure 5.11 : Principe de la conche Längsreiber tel que
construite par Lehmann

La saveur
Pendant le malaxage, les composants
volatiles, en particulier les acides volatiles, s’échappent du chocolat.
L’élimination d’une partie d’entre eux est recherchée. En outre, à des
températures relativement élevées (au-dessus de 70°C), il se produit un grand
nombre de réactions chimiques pendant ce processus, qui provoquent toutes des
changements de saveur. Par exemple, la saveur de caramel dans le chocolat au
lait peut être rendue relativement plus forte ou plus faible, et une saveur
'arrondie' en 'arrondissant' les particules de sucre et en enfermant les
particules solides dans la graisse. Ces processus sont traditionnellement
effectués à des températures de 80 à 85°C, et ont de longues durées de la
transformation. Les efforts visant à changer cette approche démontreront que le
développement de la saveur du chocolat est un territoire en grande partie
inconnu, et que des durées de la transformation plus courtes ne donnent pas
automatiquement le même résultat final. Par exemple, l'humidité peut jouer un
rôle dans le développement des composants de saveur, et son élimination
précipitée peut entraver ce processus.
L’homogénéité
Pendant le raffinage par rouleaux, la pâte est attirée à
travers des fentes très étroites, ce qui les raffine à la dimension particulaire
désirée, mais qui aplatit également plus ou moins plusieurs particules qui, en
conséquence, formeront de grands agglomérés. L’importante force de cisaillement
qui a lieu pendant le malaxage pousse ces agglomérés à se s’éclater et à se
répartir sur toute la phase de graisse continue, sans qu’il n’y ait une autre
réduction (indésirable) des particules. Ceci améliore l’homogénéité du produit,
également en termes de ses propriétés de consommation.
Les
propriétés rhéologiques
Dans le processus de raffinage par
rouleaux, la pâte est raffinée mais est également malaxée, comme dans le passé,
cependant pas à un degré tel que toute la superficie très élargie des particules
soit couverte par une couche de graisse; et c'est cette couche qui est
nécessaire pour donner au chocolat de bonnes propriétés rhéologiques, tout en
utilisant la plus petite quantité de graisse possible.
Un autre
aspect très important du malaxage est la libération de l'humidité, étant donné
que la présence d'humidité affecte la viscosité et le rendement du chocolat ;
cependant, on ne peut souvent pas empêcher les quantités d'humidité relativement
grandes présentes dans les matières premières de s’ajouter au taux d’humidité de
la pâte qui entre dans le raffineur à rouleaux.
La première mesure
importante prise pour accélérer le processus de malaxage était d’en faire un
processus 'à sec'. Il a été conçu, à cet effet, des conches spéciales, dans
lesquelles la poudre provenant des rouleaux avec un taux de graisse d’environ
25% est, comme dans le passé, tournée de façon régulière, tandis que l'espace se
trouvant au-dessus d’elle est ventilé. Le produit est progressivement chauffé
par l'énergie de friction, ce qui pousse l'humidité et les acides volatiles à
s’échapper. Le beurre de cacao est ensuite ajouté en quantité suffisamment
petite pour produire une pâte épaisse. Une énergie additionnelle est également
apportée au produit par la force d'agitation, et plus la vitesse de rotation est
élevée, plus l'énergie ajoutée augmente.
Le mouvement d'agitation est
important, car il brise les agglomérés, et contribue également à la
lubrification des surfaces des particules solides. Les propriétés rhéologiques
finales du chocolat sont déterminées pendant cette phase de
'plastification'.
Figure 5.12 : Conche Frisse avec des
bras de malaxeur résistants


La dernière étape de la fabrication de chocolat est l'ajout du beurre de
cacao et de la lécithine restants en vue de rendre le chocolat complètement
liquide. Cette phase s'appelle le malaxage humide. Dans la direction inverse à
celle de la rotation des agitateurs, et à très grande vitesse, le chocolat est
lancé contre les parois, comme dans le Längsreiber traditionnel. Avant tout
autre traitement, la saveur et les propriétés rhéologiques du produit sont
vérifiées.
Figure 5.13 : Conche Thouet


Figure 5.14 : Conche Carle-Montanari Homega

Les systèmes continus sont les dernières évolutions en matière de malaxage.
Nous avons par exemple, la conche Konti de Petzholdt.
Figure
5.15 : Conche Konti (Petzholdt)

Comme expliqué plus haut, les propriétés finales du chocolat sont en grande
partie déterminées par la méthode de malaxage utilisée. Les fabricants de
chocolat sont donc très réservés au sujet des méthodes qu’ils emploient, tout
comme ils le sont au sujet des ingrédients qu'ils mettent dans leurs recettes,
et des qualités et des méthodes de traitement qu’ils choisissent pour leurs
mélanges de liqueur de cacao.
Le malaxage dans le raffineur
centrifuge
Les raffineurs centrifuges comme la conche de
raffinage McIntyre décrite plus haut ont un ventilateur monté au dessus de la
machine, qui est mis en marche lorsqu’il n'y a plus de poudre sèche. Le
ventilateur assure un jet d'air frais continu au-dessus du chocolat,
déshumidifiant et désacidifiant ainsi le produit, mais à un degré moindre que
dans les autres conches.
Le développement de la saveur
dans le moulin à billes
Le malaxage peut également avoir lieu
dans le moulin à billes. Etant donné que ce système n'est pas approprié à
l'échange d'humidité, le réservoir intermédiaire est souvent équipé d'un
ventilateur. Parfois, par exemple, dans les systèmes comme le Wiener, un
disque tournant au-dessus de la surface du liquide produit une fine couche de
matière et ceci, associé à la ventilation, facilite l'élimination de l'humidité
et de l'acide du chocolat. Le moulin à billes n’offre que très peu de
possibilités dans le choix de la saveur.
La nécessité de malaxage peut
être réduite par l’utilisation de liqueur de cacao prétraitée ou purifiée, c’est
à dire une mince couche de liqueur de cacao dont l’humidité et les acides ont
été éliminés.
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